En bref, dans notre article :
- 10 avantages d'un média de marque et comment expliquer leur croissance
- Les étapes concrètes du lancement : identification des personas cibles, prospects, format, ligne éditoriale etc.
- Mesurer la réussite de son média (KPI, data...)
- Bonnes pratiques et cas pratique (l'exemple de Hubspot et The Hustle)
Parce qu'un média permet de travailler en même temps la notoriété, la captation de données de la cible et d'augmenter les ventes, l'idée de lancer son propre média lorsqu'on est une marque fait son chemin. Accroissement du lien de confiance, preuve de l'expertise, réassurance en avant-vente : les bénéfices soft du média, face aux stratégies plus ROIstes et "bas de funnel", sont immenses.
De la création totale au rachat de média déjà existant, de multiples formules coexistent, aux Etats-Unis comme en France. Côté rachats, citons :
- The Hustle par Hubspot
- Indie Hackers par Stripe
- Scotch.io par Digital Ocean
- Barstool Sports par Penn National Gaming
- Makerpad par Zapier
Côté création ex-nihilo, on pense à :
- Welcome to the Jungle
- Le comptoir par Malakoff Humanis
- Le Hub par La Poste Solutions Business
- Lumière sur la SEP par Roche
- 18h39 par Castorama
- Big Media par la BPI
Quels sont les attributs d'un média de marque ? Par quelle étapes passer avant de lancer ? Quelles sont les bonnes pratiques, et à quoi faire attention ?
Nous sommes heureux de partager avec vous ici un compte-rendu de la conférence organisée avec nos amis de l'agence Intuiti, en particulier Quentin Franque, Directeur Marketing & Communication. Julia Cames, Directrice marketing France d'Hubspot, était notre invitée.
Vous pouvez (re)voir la conférence en vidéo ici, et accéder à toutes les slides ici.
1- Contexte : deux façons d’expliquer la croissance des médias de marque
— Parce que les marques ont surexploité les leviers historiques des stratégies d’acquisition…
D'abord, le mimétisme. Parce que de nombreuses marques produisent du contenu similaire et de qualité moyenne, les clients basent de moins en moins leur décision d'achat sur ces contenus. Le nouvel objectif à se fixer est clair : produire du contenu de qualité à forte valeur ajoutée, aspirationnel, informatif, interactif... pour rassurer, convaincre, créer de la confiance.
Ensuite, la dépendance. À investir depuis des années sur des plateformes tierces, dont elles ne maîtrisent ni les algorithmes ni les desseins business, les marques sont devenues dépendantes des coûts d'enchère des plateformes. Solution : capter les données first-party de leur cible elles-mêmes, sans intermédiaire.
Enfin, le sous-investissement sur "le branding", au profit de stratégies plus "bas de funnel" (comme les paid ads), a conduit à une hausse des coûts d'acquisition sans augmenter le flux de prospects en amont. Élargir la cible en haut de funnel devient alors une priorité.
— Parce que la législation, qui accompagne l’évolution des usages des utilisateurs, accélère la transition d’un modèle “ads-based” à un modèle “content-based”
Récupérer sa propre data first party, sans intermédiaire tiers, cela permet de prendre le contrôle de la connaissance de votre cible, et de préparer l'avenir sans third-party. Mais cela ne se fait qu'avec du contenu pertinent... oubliez les ads !
Les utilisateurs ont repris le contrôle de leur donnée > et donc la marque ou le média doivent demander l'accord pour la partager > il faut donc chercher de la data zéro ou first party pour compenser le "brouillard" autour des données third-party > il faut donc capter de la donnée vous-même > qui ne peut s'obtenir que grâce à un contenu pertinent !
2- Pourquoi lancer un média de marque
— Ce que permet un média de marque
Parce qu'un média permet de travailler en même temps sa notoriété, la captation de données de la cible et d'augmenter les ventes, c'est un projet complet qui prend toute sa place dans une stratégie marketing omnicanale, que l'on soit une start-up ou un grand groupe.
Ci-dessous, un schéma présentant les différents types de contenu à produire en fonction de l'étape du funnel.
Accroissement du lien de confiance, preuve de l'expertise, réassurance en avant-vente : les bénéfices soft du média, face aux stratégies plus ROIstes et "bas de funnel", sont immenses.
— 10 raisons de lancer un média lorsqu'on est une marque
- Se positionner comme principal sachant sur le sujet que l’on adresse - et ainsi créer l’évidence de la décision d’achat
- Rendre un service à ses clients & prospects - et ainsi prouver son utilité pour répondre aux besoins / pain points de notre cible
- Se rendre indispensable à ses prospects - pour l’exercice du métier (B2B) ou la vie quotidienne (B2C)
- Centraliser les requêtes autour de sa problématique - et faire venir ses prospects à soi, au fur et à mesure que le marché mature
- Mieux comprendre sa cible - grâce aux data collectées
- Diminuer le coût d’acquisition - grâce à un gain en notoriété et crédibilité
- Diversifier les formats - et ainsi créer une expérience plus riche et augmenter la LTV
- Se concentrer sur un levier branding simple - plutôt que de créer des parcours clients très compliqués
- Aider au recrutement - en améliorant la marque employeur
- Entrer en contact avec ses cibles - en les interviewant !
“Le lancement de notre média avait un objectif clair : incarner l’expertise du groupe, avec des contenus pensés pour éclairer nos clients. Il est vu comme un service qui doit faire évoluer les pratiques.”
Marie Hardy
Responsable Marque, Communication Corporate, RSE et Social Media chez Malakoff Humanis
— Média de marque vs blog d'entreprise
Les différences entre un média de marque et un blog d'entreprise sont nombreuses, sur le fond comme sur la forme.
Sur le fond, un média de marque :
- Cherche à rendre un service (d'information ou plus concret)
- Possède une neutralité de point de vue
- Ne parle pas de lui
- Fait appel à des experts indépendants
- Diffuse un travail de recherche, de croisement d'infos
- Vise à créer de la valeur et non pas à répondre à un algorithme (notamment ceux des moteurs de recherche)
Sur la forme, un média de marque :
- Offre une récurrence de production
- Apporte une attention particulière à l'illustration et la qualité de la langue
Toutefois, des divergences existent :
- Un média de marque doit-il TOUJOURS avoir une neutralité de point de vue ?
- Un média de marque doit-il TOUJOURS refuser l'usage de la 1ère personne ?
- Un média de marque se construit-il TOUJOURS sur l'usage de la donnée lecteur ?
Il existe différentes sortes de médias de marques, mais ils ont tous un point commun : la gratuité du contenu.
Gratuits... absolument gratuits ? Un "Registration Wall" peut être apposé sur vos contenus afin de conditionner leur accès au partage de data 1st party. Utilisé par des médias comme le JDN ou encore Welcome to the Jungle, l'usage d'un regwall se révèle extrêmement utile pour capter la data de vos lecteurs... et mieux connaître vos audience.
Voir ici 10 exemples d'entreprises qui ont créé leur propre média.
3- Les étapes pour lancer son média de marque
Les étapes pour lancer votre média de marque sont sensiblement les mêmes selon votre taille... et votre sujet. Nous vous proposons ici un plan d'étapes, puis une liste de DO's et DON'Ts.
- Etape 1 : Identifier vos personas cibles, notamment ceux qui génèrent le plus de business direct (achat) ou indirect (recommandation)
- Etape 2 : Dessiner le parcours des prospects, et à quel moment le média va les aider dans leur chemin décisionnel
- Etape 3 : Décision sur le format de lancement : créer un nouveau média de zéro, ou en racheter un existant ? Selon l'option choisie, posez votre business plan et définissez vos KPIs à piloter
- Etape 4 : Construisez votre ligne éditoriale, identifiez les formats de contenu les plus pertinents selon vos objectifs (texte, vidéo, audio...)
- Etape 5 : Set-up & coordination ! Il est temps de lancer, de racheter ou de construire votre site...
- Etape 6 : Mesure du succès. Reprenez vos KPIs, regardez comment ils se portent, réorientez si besoin.
— DO : Définir vos objectifs... Non mais vraiment !
Pourquoi publiez-vous ? D'ailleurs en 2 mots, "pour quoi", la question sonne plus juste. Définir un objectif par typologie de contenu, et parfois à la granularité contenu-même est un travail parfois pénible, mais tellement utile.
A quoi peut bien servir un contenu ?
- Notoriété initiale
- Réassurance dans le parcours d’achat
- Acquisition de leads
- Vente en ligne
- Vente physique (Web to store)
- ...
Comment mesure-t-on son efficacité ?
- Pour la notoriété : nouveaux visiteurs, visiteurs d'une zone géographique en particulier, back links, partages...
- Pour le recueil de leads : nouveaux leads récoltés, taux de conversion au partage de data (sur 100 lecteurs, combien ont accepté de me laisser leurs données ?)
- Pour la vente en ligne : clics vers page produit, taux de conversion à l'achat
- Pour la réassurance : temps de closing d'une vente
- Pour tous : l'ARPU. Le revenu moyen par utilisateur est le KPI roi qui permet d'englober le résultat de tous les business models en un seul.
Définir ses KPIs avec précision permet de piloter son média et d’orienter sa production éditoriale sans perdre de vue pourquoi on le fait…
Définir quoi publier
Maintenant que l'on sait ce que l'on veut faire avec ses contenus, il ne reste qu'à... définir quoi produire. Bien sûr, c'est une science aléatoire, mais qui trouve ses réponses avec des tests, et du temps.
L'article "Mais à quoi peut bien servir mon article ?" écrit par le rédacteur en chef du journal suisse Le Temps en 2019, Gaël Hurlimann, est toujours d'un intérêt précis, et nous vous recommandons fortement sa lecture.
— DO : comprendre ce qui vous apporte de la valeur... à vous !
Il est passionnant de se plonger dans vos analytics, et précisément de comprendre les comportements de chaque population de lecteurs que vous réunissez. Et pour avoir accompagné plusieurs dizaines de médias traditionnels sur leur stratégie de conversion, nous avons vu de manière universelle les niveaux de monétisation évoluer en même temps que l'engagement, sur toutes les métriques importantes. Le tableau ci-dessous montre la corrélation entre la régularité de consultation du contenu et la conversion :
Maintenant que l'on a compris que créer du contenu qui engage, crée une habitude et donc "fait revenir" est la première des pierres angulaires, il est pertinent de regarder d'autres segmentations d'audience pour comprendre où sont les meilleurs taux d'achat :
- Type de device : mobile, ordinateur, tablette ;
- Source de trafic : moteurs, newsletters, sites partenaires...;
- Langue ;
- Pays de consultation ;
- Statut du visiteur (anonyme, logué, client).
Et souvent, les réponses sont percutantes :
... et permettent d'orienter la production de contenu en fonction.
— DO : Prouver la valeur en interne grâce aux data
On l’a vu lors de la crise Covid : en majorité, les budgets non liés à des actions génératrices de business ont été coupés. Certains sites médias de marque en ont fait les frais. Pour éviter cela, voici 3 niveaux d’investissement qui peuvent vous aider :
“Chaque année, mon budget diminuait de 10%. Avec du recul, je suis persuadée que les chiffres auraient pu me sauver. J’ai mis en place des tableaux de bords toujours plus précis dans l’analyse du lectorat mais ce n’était pas suffisant. Il aurait également fallu prouver l’attribution de tel ou tel business à l’action de notre média.”
Ancienne directrice d’un média de marque B2B français, en "off"
— DON'T : Trop d'auto-promotion
Faire de l’auto-promotion de ses produits ou services est possible. Néanmoins, en faire trop nuit à la crédibilité du média.
Questions sous-jacentes :
- Où se situe le juste milieu ?
- Comment résister aux demandes d’autres équipes ou même de votre direction ?
En 10 ans, nous avons parlé seulement deux fois de la marque. Au même moment d’ailleurs : lors du 1er confinement. Nous avions une solution qui répondait à des besoins urgents pour de nombreuses entreprises et il était alors facile de parler de nous, tout en restant utiles pour notre audience.
Ancienne directrice d’un média de marque B2B français
— DON'T : Parler de ses concurrents n'importe comment
En partant des données de recherche de vos cibles (= les Search Insight Reports), vous pouvez définir ce qui est important pour vos cibles. Il est quasi certain que parmi les attentes de vos cibles, l’identification ou la comparaison de solutions similaires et donc concurrentes à la vôtre est présente.
Les bons médias de marque parlent parfois de leurs concurrents avec honnêteté. Voici quelques astuces que nous avons tout de même repérées pour ne pas (non plus) trop leur servir la soupe :
- Mention de concurrents très connus (qui étaient probablement déjà dans la tête de vos prospects) mais omission de concurrents en croissance
- Absence de backlinks
- Mention dans des contenus téléchargeables (PDF) mais pas sur les contenus référencés par Google
— Organiser son équipe média
On remarque que, au fil du temps, les équipes de médias de marques se structurent souvent de la même façon :
— Récapitulons
DO :
- Apporter de la valeur à votre cible
- Mettre la captation de données au coeur du média
- Prouver la valeur en interne grâce aux données
- Chercher à rendre un service réel à vos lecteurs
- Mélanger actualités & services
- Donner un accès et des contenus privilégiés à vos clients
- Utiliser le média pour tester des fonctionnalités difficiles à lancer à grande échelle
- Réfléchir à une approche par la communauté
DON'T :
- Faire trop d'auto-promotion de ses propres services ou produits
- Minimiser l'impact de la qualité de la langue et des visuels
- Réduire l'indépendance des rédacteurs ou journalistes
- Oublier les budgets de médiatisation
4- La bête noire : média de marque vs média d'information
Bien sûr, utiliser le mot média n'est pas sans conséquence... et quelques débats.
Peut-on réellement appeler une prise de parole d'une marque, "un média" ? On retrouve, c'est vrai, les attributs traditionnels du média :
- La marque à une stratégie, un but dans la diffusion de contenu, et même parfois « une ligne éditoriale » ;
- La marque produit la matière première, i.e, du contenu ;
- La marque détermine et développe un outil industriel pour le produire (impression de magazine papier dédié, création d’un CMS pour intégrer les productions, etc).
- La marque a un canal et un réseau de distribution : une plateforme, un site internet, une application, des comptes sur des réseaux sociaux ;
- La marque a une communauté, des lecteurs, une audience.
Il faut toutefois noter la zone grise dans lequel évolue ces médias de marque. Sont-ils des médias d’information au sens « professionnels du terme » ?
Un média traditionnel produit une information dont l’intérêt ultime est l’intérêt public.
Un média de marque publie des « contenus » au service d’une stratégie d’entreprise, dont la finalité est de vendre un produit.
Maxime Hanssen, journaliste.
La question d'embaucher de "vrais" journalistes pour son média de marque se pose ensuite. Dit-on d'ailleurs dans ce cas-là "journaliste" ou "producteur de contenu" Nous avons posé la question à nos interlocuteurs...
5- Le cas du rachat de The Hustle par Hubspot
“Avec l’acquisition de The Hustle, nous sommes en mesure de mieux répondre aux besoins des grandes entreprises en proposant du contenu éducatif, commercial et technologique dans leurs formats préférés”.
(Pour lire le décryptage complet du phénomène de rachat de média par des marques, lire l'excellent article de Quentin Franque "Allons-nous assister à une explosion de rachats de médias par des marques ?")
Dans le communiqué transmis à la presse et dans un long et passionnant article publié sur le blog de Hubspot, Kieran Flanagan, le VP marketing de l’entreprise, expliquait le choix de racheter la newsletter marketing quotidienne The Hustle, adressée à plus de 1,5 millions de personnes. Pour un montant estimé à 27 millions de dollars.
Rapide aperçu de The Hustle :
- Une newsletter quotidienne qui compte 1,5 million d'abonnés
- Un podcast qui génère plus de 370 000 téléchargements chaque mois
- Un abonnement de contenu et une communauté de 14 000 clients
“Avec cette acquisition, nous voulons offrir à notre public et à nos clients le contenu dont ils ont besoin dans le support avec lequel ils interagissent le plus, qu’il s’agisse de blogs, de YouTube, de newsletters ou de podcasts. Nous sommes enthousiasmés par les produits médiatiques actuels de The Hustle et par les nouveaux que nous prévoyons de lancer ensemble au cours de l’année à venir.”
Dans tous les exemples analysés, Kieran Flanagan, le VP Marketing de Hubspot déjà cité en introduction, est celui qui a le plus expliqué sa stratégie. Par passion ou parce qu’il cible les directions marketing, ou un peu des deux. Il a également pris le temps de répondre à des commentaires sur son compte LinkedIn pour expliquer la stratégie : oui, The Hustle va continuer à exister. Mais oui, aussi, la qualité éditoriale et les contenus produits par The Hustle vont être utilisés pour enrichir l’expérience proposée par Hubspot (qui compte déjà une académie, un réseau de podcasts…).
6- Boîte à outils
Ci-après quelques outils pour vous aider dans la création de votre média de marque :
- Méthodologie Intuiti - Cartographier votre parcours client >>> Accéder aux slides
- Podcast - 5 enseignements clés depuis le lancement de notre média B2B, par Marie Hardy, de Malakoff Humanis >>> Ecouter le podcast
- Article - 10 exemples d’entreprises qui ont créé leur propre média >>> Lire l’article
- Enquête - Les outil tech utilisés par les éditeurs de presse >>> Accéder à la synthèse
- Livre blanc - "Build the optimal registration journey" >>> Accéder au document
- Playbook - The KPI playbook for digital publishers >>> Accéder au document
7- A propos des auteurs
- Intuiti accompagne ses clients dans la maîtrise de l’ensemble du parcours utilisateur, et sa performance.
- Poool est une plateforme de conversion des audiences, qui permet aux producteurs de contenu en ligne de convertir leurs visiteurs anonymes en leads, membres et clients grâce à sa technologie de Paywall, Registration Wall et Cookie Wall avec alternative. Ecrivez-nous ici (en français ou anglais) !
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